- CRYOBIOLOGIE
- CRYOBIOLOGIECRYOBIOLOGIELa biologie du froid ou cryobiologie consiste essentiellement en un ralentissement des activités physico-chimiques des cellules, proportionnel à l’abaissement de la température. Dans certaines conditions et pour de très basses températures, ce ralentissement peut se poursuivre jusqu’à l’arrêt total de toutes manifestations vitales. On observe alors un état de non-vie, dit de «vie suspendue», état différent de la mort, car réversible. Pendant cette phase il ne se produit pas la moindre détérioration des structures cellulaires. Aucune usure ni aucun vieillissement ne sont théoriquement observés. Un réchauffement bien conduit permettra un retour à l’état initial.Pour obtenir ce résultat, il sera nécessaire de se conformer à un protocole technique rigoureux. Au cours du refroidissement d’abord, car certaines cellules, comme celles des ovaires ou des surrénales, exigent un abaissement de température à la fois progressif et relativement lent; alors que d’autres éléments, tels que les spermatozoïdes ou les globules rouges, réclament au contraire un refroidissement très rapide. Ce respect d’une certaine spécificité cellulaire vis-à-vis du froid, déterminée de façon purement empirique, permet d’éviter, dès ce premier stade, la formation de cristaux à l’intérieur même du liquide cellulaire, phénomène qui entraînerait un éclatement des enveloppes cellulaires. Une protection supplémentaire est obtenue en effectuant cette opération en présence de glycérol, de DMSO ou d’hydroxyéthylamidon à des concentrations non toxiques. Ainsi réalisé, cet état de vie suspendue peut être théoriquement maintenu indéfiniment. Lorsqu’il s’agit de réchauffer, il faut dans tous les cas aller très vite: une progression de plusieurs dizaines de degrés centigrades par minute est nécessaire.Cet arrêt provisoire de la vie par les basses températures n’est réalisable que pour des matériaux vivants de faibles épaisseurs. Dès que l’on tente de l’obtenir pour des organes d’un certain volume on se heurte à un obstacle technique majeur. Il est impossible de refroidir simultanément et de façon satisfaisante, c’est-à-dire en tenant compte de leur spécificité, l’ensemble des cellules. Cette impossibilité se rencontre à plus forte raison dans le cas extrême que représente l’être humain. Cependant, lorsqu’on abaisse la température centrale d’un homme on observe un ralentissement global de ses activités physiologiques (rythme cardiaque, rythme respiratoire, sécrétions, etc.) traduit par une diminution de son métabolisme de base. On a même pu obtenir à court terme un arrêt cardiaque et un tracé électroencéphalographique plat réversibles.De ces constatations vont se déduire les deux grands types d’applications de la cryobiologie. D’une part, une conservation quasi parfaite mais limitée aux cellules isolées, à certains éléments vivants de petites tailles et à des tissus de faible épaisseur et, d’autre part, concernant l’individu, une simple réduction de son activité physiologique, soit localement au niveau d’un de ses organes, soit globalement par une réduction de quelques degrés de sa température centrale.La conservation d’éléments vivants susceptibles de supporter les très basses températures, le plus souvent par cryogénisation dans les —196 0C de l’azote liquide, a conduit à la réalisation de «banques de cellules ou de tissus». Essentiellement à but thérapeutique, elles réalisent le stockage de matériau, tels les os, la peau, la cornée, les veines, les artères... Elles permettent aussi d’avoir en réserve des globules rouges, des plaquettes sanguines ou les cellules souches du sang. Ces dernières prélevées chez un leucémique au cours d’une rémission peuvent lui être réinjectées trois mois plus tard lors d’une rechute. L’insémination artificielle bénéficie elle aussi de ce type de conservation. Des spermatozoïdes maintenus dans l’azote liquide garde leur pouvoir fécondant pendant une durée pratiquement illimitée. Cette mise à l’abri du temps joue aussi un rôle important dans le domaine de la recherche médicale et en particulier en cancérologie où l’on peut disposer ainsi de matériau cellulaire de différentes générations et étudier leur devenir par comparaison.Lorsqu’il s’agit d’un organe prélevé par exemple en vue d’une greffe mais de trop grande taille pour qu’on puisse obtenir sa conservation par cryogénisation, l’utilisation d’un froid relativement modéré permettra cependant de ralentir la dégradation biologique. L’exemple type est fourni par le rein qui, immergé dans une solution à 0 0C, peut être conservé environ trente-six à quarante-huit heures.Lorsqu’on considère l’individu, c’est pour soustraire un de ses organes à une agression que l’on peut avoir recours à un abaissement de température localisé. En chirurgie, au cours des interventions dites «à cœur ouvert» par exemple, en utilisant des poches de glace, ou en médecine, lors de la survenue d’hémorragies, gastriques entre autres, par l’introduction, dans l’estomac, d’un ballon rempli de liquide réfrigérant; on observe alors une constriction des vaisseaux et une diminution de la mobilité de la paroi qui entraîne un arrêt de saignement. Si le stress est plus global, comme au cours d’interventions chirurgicales importantes, un abaissement de la température centrale va soustraire, de façon appréciable, l’organisme à l’agression: on a alors recours à l’«hibernation artificielle»; par une inhibition contrôlée du système neurovégétatif et l’intervention d’agents médicamenteux on obtient un ralentissement de la vie et une diminution de la température centrale qui passe de 37 à 34 0C ou même 33 0C.Enfin, lorsqu’il est appliqué brusquement, le froid a un pouvoir destructeur qui est utilisé en chirurgie (cryochirurgie). Il permet de détruire certains tissus pathologiques avec une très grande précision.
Encyclopédie Universelle. 2012.